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Casamance: la situation reste toujours tendue, surtout dans le sud-ouest de Ziguinchor

La situation reste toujours tendue en Casamance et plus particulièrement au sud-ouest de Ziguinchor. De temps en temps, les populations entendent des tirs à l’arme lourde de ce côté-là, depuis la semaine dernière. Même hier matin, mercredi, le calme matinal des Ziguinchorois a été rompu par un tir dont le bruit a terrifié les populations urbaines. Pour l’instant, il est très difficile de savoir ce qui se passe exactement au sudouest de la ville. Car les responsables de l’armée que nous avons contactés, au commandement de la zone militaire sud de Ziguinchor, nous ont dit que c’est seulement après l’opération en cours qu’ils vont communiquer avec la presse.

Comme nous l’écrivions la semaine dernière, des sources anonymes annoncent que cette opération de l’armée vise à démanteler de nouvelles bases, créées par les troupes de César Atoute Badiate, le chef de la faction de la branche armée du Mfdc de Kassolol, basée non loin de la frontière bissau-guinéenne. Selon une source non confirmée, les indépendantistes opposent une certaine résistance aux militaires.

Une chose est sûre, les tirs sporadiques à l’arme lourde qui partent du camp militaire de Ziguinchor, depuis une dizaine de jours maintenant, renseignent sur l’intensité des hostilités. Ce qui étonne tous les observateurs, cependant, c’est le fait que ce regain de tension survient juste après une série de rencontres qui ont eu lieu au Cap-Skirring et dont l’objectif est d’aider le Mfdc à parler d’une seule voix et à baliser le chemin qui mène à la table de négociations avec le gouvernement. Objectif : trouver une solution définitive à la crise que traverse la Casamance depuis près de quarante ans.

Ces rencontres ont impliqué des responsables se réclamant de toutes les sensibilités du Mfdc exceptée celle de Salif Sadio. Elles sont parrainées par la Coordination sous-régionale des Organisations de la Société civile pour la paix en Casamance (COSPAC). La dernière en date a eu lieu il y a quelques jours au Cap-Skirring.

L’objet de la rencontre, c’était pour valider un plan d’actions visant à fédérer toutes les sensibilités du mouvement indépendantiste en vue de préparer les futures négociations avec le gouvernement. Cela est d’ailleurs bien indiqué dans la déclaration finale qui a sanctionné la rencontre et lue par Nfally Badji, leur porte-parole.

Pourparlers de paix avec le Gouvernement
‘’C’est avec beaucoup de plaisir que les ailes politiques du Mfdc Asaninga, Ukaanatakon, Bignona, le groupe du général Atoute Badiate, le groupe de feu Niantang Diatta, le groupe de Contact, sous l’appui de la Cospac, AJWS ont élaboré ce plan d’action harmonisé qui fait l’objet de validation durant ces deux jours pour préparer les négociations en vue dont l’objectif est de fédérer toutes les forces pour préparer les négociations en vue de la signature des accords entre le Mfdc et l’Etat du Sénégal.

Cela se traduit par un plan d’action élaboré, partagé et validé par l’ensemble des ailes politiques présentes à l’atelier, l’engagement sans réserve de faire taire les armes au profit du dialogue, la volonté de poursuivre le dialogue avec nos frères et tout autre acteur épris de paix, notre disponibilité et l’ouverture à entamer des négociations avec l’Etat du Sénégal à travers le comité ad hoc.

Aujourd’hui, notre slogan est de travailler ensemble pour préparer les négociations seules gages d’une paix durable en Casamance. Le cadre se réjouit de la présence des partenaires comme le CONGAD, comme le GERPC, les sociocultures, Kabonkétoor, la Plateforme des femmes pour la paix en Casamance et toutes autres structures comme les femmes du Bois sacré dont le seul but est de sauver une Casamance tant meurtrie, alors que jadis luxuriante et accueillante ‘’.

Une déclaration qui, on le voit, laisse entrevoir l’éventualité d’un retour d’une paix définitive en Casamance qui est le souhait de tous. Surtout quand c’est le Mfdc, lui-même, qui appelle à cette paix. Mais quand on examine le fond, on est envahi par beaucoup de questions et surtout par une certaine prudence pour ne pas dire un pessimisme. Et pour cause, certes les représentants du Mfdc à ces rencontres sont bien membres du mouvement indépendantiste, mais, de l’avis de tous les observateurs avisés, ils n’ont aucune représentativité au sein du mouvement leur permettant de faire influencer les choses dans un sens ou dans un autre.

Autrement dit, leur voix ne peut aucunement engager le Mfdc et particulièrement l’aile combattante par laquelle passera inéluctablement toute paix qui pourrait survenir. En effet, le Mfdc se particularise par l’absence d’une aile politique forte qui ait autorité sur l’aile militaire. Même du vivant de l’abbé Diamacoune, le chef historique du mouvement, ce problème se posait déjà, une partie de l’aile combattante, notamment la faction de Salif Sadio et celle de Diakaye (front nord), n’étant pas soumise à son autorité. Voilà tout le problème qui complique la tâche des négociateurs de paix.

Malheureusement, ces derniers, motivés par on en sait quoi, font souvent semblant d’ignorer cet aspect, préférant toujours manipuler avec quelques billets de banque des éléments se réclamant du mouvement et qui parcourent les rues de Ziguinchor mais qui en réalité ne représentent rien car vomis par leurs frères du maquis. Ils font ça sans aucun doute pour avoir des cautions leur permettant de convaincre les bailleurs qui ignorent la réalité à financer leurs programmes bidons qui n’ont jamais permis de faire avancer le processus de paix.

On ne peut pas faire la paix sans l’implication de ceux qui sont à l’origine de la violence. C’est à dire les combattants du maquis. Ces programmes ne profitent, en réalité, qu’à ces responsables qui dirigent les organisations (Ongs et autres associations) bénéficiaires. La condition sociale de beaucoup de personnes qui n’avaient même pas de vélos, il y a quelques années, a considérablement changé.

En effet, ces gens ont presque tous des immeubles dans des quartiers résidentiels de Ziguinchor ou dans d’autres grandes villes du pays. Bien entendu, ils ne se soucient guère de la recherche de la paix au nom de laquelle, pourtant, ils obtiennent ces financements. Pour preuve, depuis le début des hostilités en cours, on n’a entendu aucun de ces responsables faire la moindre déclaration pour appeler à la cessation des combats. Ce jeu a trop duré en Casamance et semble avoir de beaux jours devant lui car ses adeptes font tout pour qu’il en soit toujours ainsi.

La seule organisation crédible, c’est le GRPC de Robert Sagna Aujourd’hui, de l’avis de tous les observateurs, la seule et unique organisation qui fait un travail qui peut être payant demain, c’est le Groupe de réflexion pour la paix en Casamance (GRPC) de l’ancien ministre d’Etat Robert Sagna dont l’approche a un double avantage : impliquer toutes les populations de la Casamance dans le processus de paix et, en même temps, parler avec les vrais combattants du Mfdc.

En fait Robert Sagna, connaissant bien la sociologie locale, a bâti son projet de paix autour de l’idée qu’on ne peut pas construire la paix sans l’implication des villages. De son point de vue, en effet, les combattants du Mfdc qui se trouvent dans le maquis y ont été délégués par des gens vivant dans leurs villages respectifs. Donc, pour les en faire sortir, il faut prendre langue avec ceux qui les ont délégués, estime-t-il fort justement.

Ainsi, Robert Sagna et son groupe composé de personnes ressources comme l’éminent historien Nouha Cissé, très au fait des pratiques ancestrales de règlement de conflits en Casamance, parcourent inlassablement tous les coins de la Casamance pour animer des forums auxquels prennent part tous les segments des populations et des combattants actifs du Mfdc, originaires des localités qui accueillent ces forums.

À la fin de chacun de ces forums, il rencontre ces combattants avec son staff, à huis clos, pour leur expliquer le sens de sa démarche. Certes, la paix n’est pas encore totalement revenue en Casamance mais ces démarches entreprises par l’ancien maire de Ziguinchor ont permis d’obtenir des résultats très significatifs. Parce que des zones naguère très redoutées, comme le Narang où personne n’osait s’aventurer, ont retrouvé la quiétude et la sérénité aujourd’hui. Quand on y va aujourd’hui, on voit partout le drapeau du Sénégal flotter, preuve que la paix est en train d’y revenir de façon progressive.

Toutefois, ces acquis ne doivent pas amener le gouvernement à dormir sur ses lauriers et penser que la paix est revenue définitivement, avertit le professeur Nouha Cissé qui demande avec insistance à l’Etat de ne pas chercher à vouloir régler cette crise par le pourrissement. En clair, le professeur Cissé demande à l’Etat de prendre langue avec les indépendantistes pour conclure des accords, gage d’une paix définitive.

Ce qui se passe actuellement semble lui donner raison. En fait, rien ne laissait présager une nouvelle reprise des hostilités dans la région, après tant d’années d’accalmie. En l’état actuel, nul ne sait quelle tournure vont prendre les événements d’autant que c’est la faction du Mfdc considérée jusque-là par tous les observateurs comme modérée, qui est aux prises avec l’armée.

Avec cette énième reprise des hostilités, on est tenté de dire que toutes ces rencontres tenues ces derniers mois dans des hôtels au Cap-Skirring, ce n’était que du théâtre et rien que du théâtre comme les ont qualifiées du reste certains membres du Mfdc vivant à Ziguinchor qui ont préféré de ne pas y aller pour, disent-ils, ne pas cautionner des duperies.

Jean Diatta, correspondant de Le Témoin en Casamance

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