Le Seigneur met ici au défi les djinns et les hommes de percer les mystères du monde invisible, un monde pourtant jugé par certains comme étant inaccessible pour les créatures.
La sourate « AR-Rahman » (Le Tout Miséricordieux) demeure une sourate pleine d’insinuations sur les signes pouvant témoigner de l’existence d’une instance suprême : le Créateur. Et la réalité de cette instance est si évidente qu’une observation minutieuse ainsi qu’une méditation sur les phénomènes qui nous entourent peuvent en être la clef. A ce titre, dans les versets 20 et 21 de cette même sourate, le Coran apparut au 6 ème siècle, nous renseigne déjà sur une vérité peu ou pas connue à cette époque et qui concerne les eaux qui ne peuvent se mélanger à l’instar de l’océan atlantique et pacifique : « Il donne libre cours aux deux mers pour se rencontrer (…) il y a entre elles une barrière qu’elles ne dépassent pas ». Un phénomène qui s’explique, selon la science, du fait de la différence entre la densité ou la salinité de deux eaux attenantes. L’être qui a très vite répondu à l’invitation de son Seigneur concernant la méditation vis-à-vis de l’univers, s’intéressera surement au-delà de la découverte des réalités terrestres, aux réalités des cieux et des autres terres.
C’est surement ce qui a conduit les scientifiques à organiser des voyages spatiaux par le biais d’engins robotisés ou de vaisseaux pilotés. D’ailleurs, plusieurs exégètes ont interprété notre verset à l’étude, comme un présage quant aux progrès scientifiques actuels en rapport avec la poussée de la « conquête » de l’espace. Une conception qui s’est davantage forgée suite à la découverte des 7 couches de l’atmosphère allant de la troposphère à la magnétosphère. Pour ceux-là, par « pouvoir illimité », Dieu entend le pouvoir des hommes à fabriquer des engins capables de leur faire voyager dans l’espace. Une interprétation qui ne nous satisfait nullement, mais qui peut suffire à un scientifique désireux d’un soubassement coranique, pour étayer ses découvertes d’autant plus que, le Coran s’adresse à l’humanité toute entière dans sa diversité et selon le niveau spirituel de chacun.
Une autre exégèse sur ce verset, est celle qui l’inscrit dans l’alliance qui lie souvent les médiums aux djinns et qui permet à ces praticiens des sciences divinatoires de formuler des prédictions suite aux réponses que leur apportent leurs alliés djinns. Par « pouvoir illimité », ceux-là entendent donc ce pouvoir dont disposent les djinns à s’élever dans les limites du premier ciel. Mais cet état de fait n’est plus d’actualité puisque même si les djinns avaient le pouvoir de frôler ce ciel pour s’enquérir des résolutions divines sur lesquelles les anges conversaient pour les rapporter à leurs acolytes humains, ceci n’est plus possible depuis la naissance du prophète « Nous avions frôlé le ciel et nous l’avions trouvé plein d’une forte garde et de bolides (…) ; Nous y prenions place pour écouter. Mais quiconque prête l’oreille maintenant, trouve contre lui un bolide aux aguets ». (s.72 ; v.8 et 9).
Une autre explication de notre verset du jour, peut-être la plus répandue, renvoie son contexte au jour du jugement dernier d’autant plus que la sourate « Ar-Rahman » dans laquelle elle se trouve évoque beaucoup ce jour d’après les tenants de cette interprétation. Un jour pendant lequel, il ne sera possible pour nulle âme de s’échapper des jougs du Seigneur. Mais serait-t-il raisonnable de trouver une logique quant à la façon dont Dieu dispose ses versets, surtout que sa logique de Créateur diffère énormément de celle de la plupart des êtres crées. Aussi, la phrase ” vous ne pourrez en sortir qu’à l’aide d’un pouvoir illimité” ne trouvera pas de sens puisque, selon les commentateurs de ce versant, il sera de toute façon, impossible ce jour-là, de s’échapper de l’emprise divine. Ce qui ne résout pas le pourquoi de l’utilisation du concept de “pouvoir illimité”.
Au regard de ces diverses tentatives d’explication présentes dans le monde musulman, ce verset n’est qu’une façon de plus pour Dieu de restreindre les créatures quant à ses mystères. Mais pourquoi donc Allah fait mention de la notion de « pouvoir illimité », cette notion à multiple conceptions, en précisant même « vous ne pourrez en sortir qu’à l’aide d’un pouvoir illimité » s’il sait déjà qu’aucun ne le détient. L’expression « qu’à l’aide d’un pouvoir illimité », démontre clairement qu’il est bel et bien possible de détenir ce pouvoir sinon notre Seigneur n’allait pas en faire mention ou aurait carrément dit que l’acquisition de ce pouvoir est impossible. A cet effet, en s’adressant aux dénégateurs du Saint Coran, Dieu leur met au défi de produire une sourate semblable à celles du Coran, avant d’indiquer l’impossibilité pour eux de faire un tel exploit « Si vous n’y parvenez pas et, à coup sûr, vous n’y parviendrez jamais, parez-vous donc contre le feu qu’alimenteront les hommes et les pierres, lequel est réservé aux infidèles » (s.2 ; v.24). Ceci indique nettement, en relation avec la rhétorique utilisée dans le Coran, que ce verset n’est guère une limite imposée par Dieu à la création et que le terme « pouvoir illimité », fait allusion à une toute autre réalité.
Sur ce, il est important de garder à l’idée le niveau d’interprétation de chacun en rapport avec son degré spirituel et d’éviter de réfuter toute idée contraire à la nôtre. A cet égard, les enseignements de Seydi Mouhamed El Cheikh nous fournissent une explication de ce verset basée sur le coté caché du Coran (fourqane) et qui a rapport au pouvoir spirituel des hommes de Dieu, qui leur permet de franchir les limites des cieux et des terres au moyen de leur pouvoir spirituel (wilaya), entendu ici sous le vocable de « pouvoir illimité ». Le pouvoir spirituel est, en effet, une lumière « opérationnelle » émanant de la lumière de la « salat al fatihi » (le superlatif absolu), dont il est possible de se procurer par l’intermédiaire du zikr. Ce zikr doit toutefois, se faire selon un nombre usité et sous la houlette d’un guide spirituel digne de ce nom à travers une formation spirituelle (tarbiya).
Bien que différente d’une époque à une autre, la formule à réciter lors de ce zikr à toujours comme finalité de pourvoir, un brin de lumière de la « salat al fatiha» à celui qui effectue ce zikr, ce qui lui permettra de pouvoir s’extirper de ce monde terrestre pour enfin s’élever, selon son degré de lumière, sans barrière dans les cieux ou encore d’aller dans les profondeurs des terres. Encore, le secret qui sous-tend cette lumière que représente « le pouvoir illimité » a depuis toujours et continue d’être détenu par Mawlaya Cheikh Ahmad-Tijani (rta), le Souverain des Elus et Intermède entre d’une part, le Messager d’Allah (psl) et les autres Prophètes (katmiya), et d’autre part, entre le Prophète (psl) toujours et les créatures dans leur ensemble (khatmiya). Avant même sa venue au monde, Cheikh Tijani (rta) assurait ce rôle et le coordonnait depuis le monde invisible (ghayb), un monde quoique considéré par certains comme inaccessible à toutes créatures oubliant que les anges résident dans les cieux qui eux, font partie de l’invisible. Rappelons que par cieux nous entendons les 7 cieux qui se distinguent des 7 couches de l’atmosphère contrairement à ce que profèrent certains. C’est d’ailleurs de ces cieux dont Dieu fait allusion dans le verset qui nous intéresse « Si vous pouvez sortir du domaine des cieux et de la terre ». Il existe également 7 terres qui divergent aussi des planètes dites du système solaire (cf. causeries de Seydi Mouhamed El Cheikh sur les 7 cieux et les 7 terres).
En définitive, si la plupart ont vu en ce verset une limite de plus imposée par le Seigneur à la créature, d’aucuns ont par contre, vite compris son sens réel et l’ont exploité très tôt. Des générations d’Hommes de Dieu se sont ainsi succédé en revendiquant le sultan («pouvoir illimité »), sans vraiment trouver large auditoire. Ceux-là ont pu de leur vivant explorer le monde invisible. N’est ce pas « la grâce est en la main d’Allah. Il la donne à qui il veut. La grâce d’Allah est immense et il est Omniscient » (s.3 ; v.73). D’un autre coté, les idéologies qui jugent les sphères invisibles impénétrables persistent, pourtant le paradis, dont rêvent tant leurs défenseurs, se trouvent bien dans ce monde au 5eme ciel, précisément.
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