Sociétés et traditions

PLUS DE 400 CAS DE DIVORCES PRONONCES PAR MOIS A DAKAR : SOMMES- NOUS TOUS RESPONSABLES ?

Considéré comme une union pour la vie, pour le meilleur et pour le pire, le mariage est même jugé sacré dans plusieurs pays, notamment au Sénégal.

Avant, nos aïeuls se mariaient pour la vie, et utilisaient même l’expression wolof « sèy », qui veut dire se dissoudre et qui sous-entend que, quand la femme rejoint son domicile conjugal, elle devrait tout faire pour y rester jusqu’à la fin de ses jours.

Mais maintenant, au Sénégal, on voit que la donne a changé et généralement les mariages ne durent plus longtemps. Les divorces sont devenus un phénomène de société au Sénégal au point même d’inquiéter plus d’un Sénégalais.

Ainsi, le sociologue Mamadou DIME, interrogé sur cette situation, en a fait l’analyse suivante :

« Les statistiques semblent démontrer une explosion du divorce au Sénégal. En moyenne, à Dakar, par exemple, près de 400 cas de divorce sont prononcés par les tribunaux par mois. Ceci ne tient pas compte de la répudiation qui est l’autre forme de divorce. Il convient de souligner que les divorces sont de plus en plus «judiciarisés» par rapport au passé.

Pour bien comprendre ce phénomène, il est important de souligner le caractère incontournable du mariage au Sénégal. Dans l’imaginaire populaire, le mariage est la consécration pour toute femme, comme le mettent en exergue les chansons populaires et les maximes des différentes ethnies. Le divorce, parce qu’il fragilise cette solide institution sociale qu’est le mariage, est souvent plus amplifié… »

Il soutien ainsi que parmi les causes les plus fréquentes des divorces il y a le rôle de l’homme pourvoyeur de revenus et de la femme maîtresse du foyer qui est totalement remis en question par les évolutions sociales et économiques. La femme, surtout celle jeune, professionnelle et scolarisée, revendique plus d’autonomie et une redéfinition des relations de couple dans le sens de plus d’égalité, alors que les hommes, même scolarisés, sont restés prisonniers de schèmes de référence plus conservateurs quant au rôle de l’épouse et à ses relations d’avec la belle-famille, par exemple.

D’autres causes de divorce aussi sont évoquées par certains ; des causes liées en général à plusieurs facteurs notamment la manque de confiance, l’incompatibilité d’humeur, l’absence de projet clair, le pouvoir de l’argent, inadaptation de nos valeurs à celles occidentales etc.

Autant de causes donc qui font que les unions ne durent que le temps d’une rose. Les belles familles, au-delà des conjoints, sont aussi indexées comme cause de l’instabilité des ménages.

Si les beaux-parents évoquent le manque d’éducation des jeunes filles mariées pour expliquer les problèmes au sein des ménages, ces dernières indexent une certaine jalousie que les belles mères manifestent envers elles surtout quand le mari montre un très grand sentiment d’amour à l’égard de sa conjointe. Un comportement qu’elles ne manifestent pas souvent en présence de leur fils, soutiennent certaines personnes interrogées.

Pour A. FALL, la soixantaine sonnée : « de notre temps, nous avions bénéficié d’une bonne éducation et l’on s’habillait de façon décente et avions un respect profond à l’égard de toute personne âgée.

Ce qui n’est pas le cas pour les nouvelles générations dont beaucoup ne respectent même pas leurs propres parents. Ces nombreux divorces sont liés à un problème d’éducation et les parents doivent jouer leur partition», souligne-t-elle.

Ce que confirme une autre interlocutrice qui s’est abstenue de décliner son identité : « Les divorces sont légion et pour preuve, à 30 ans, on peut voir de nos jours des gens contracter trois mariages, ce qui est grave quand même et malheureusement ce sont les enfants qui en pâtissent, faute de repères », se désole-t-elle.

Un homme assis à côté et qui entendait les propos ne s’est pas empêché de donner son avis sur la question : « Il faut souligner que la faute est partagée car il y a des hommes qui aiment les aventures avec toutes les belles femmes qu’ils rencontrent. D’autre part, les femmes, pour la plupart, sont matérialistes et tiennent à leur liberté. S’y ajoute le caractère autoritaire de certains hommes qui considèrent la femme comme une œuvre d’art », déplore-t-il.

Certaines femmes soutiennent que la faute incombe aux maris

Certaines femmes rencontrées et interrogées sur ce sujet soutiennent que ce sont les époux, de par leur comportement «irresponsable», qui favorisent cette tension entre l’épouse et sa belle-mère. «Lorsque la tension éclate, l’époux ne prend pas son courage à deux mains pour tenter de ramener la belle-mère à la raison. Au contraire…», soutiendra S. DIOP

Ce que confirme aussi  R. NDIAYE : «ma belle-mère, à qui je voue un profond respect, ne s’est pas empêché de créer une tension permanente dans mon ménage juste par jalousie envers moi. Elle s’intéresse à mes bijoux à mes nouveaux habits, en somme, à tout ce que fait mon mari envers moi ; elle l’observe à la loupe. Et le comportement parfois « irresponsable » de mon mari a mis le feu au poudre car il croit tout ce qu’elle lui dit à mon égard sans réfléchir », dit-elle.

Un choix difficile et impossible parfois pour certains hommes

Mais pour les hommes qui sont ainsi indexés, B. M, un employé dans une société de transport soutient : « avant de rencontrer et d’épouser ma femme, il n’y avait que ma mère à mes côtés pour me soutenir. Elle est tout pour moi et elle a tout fait pour moi.

Tout ce que je suis devenu aujourd’hui c’est grâce à elle. Je ne vais donc pas me permettre ou admettre que quelqu’un lui manque du respect ou lui fasse du mal, même si ce quelqu’un-là est ma femme. Sinon, je vais devenir le pire des ingrats ».

Toutefois, soutient toujours B. M, « Je ferai quand même de mon mieux pour que, lorsqu’ un problème survient entre ma femme et ma mère, que je puisse le résoudre le plus simplement possible, sans que personne ne se sente lésée. Ainsi, je ferais comprendre à ma mère que mon épouse est sa fille et vice-versa ».

« On ne doit pas, à chaque fois, vouloir accuser les maris quand des problèmes de cette nature surviennent. Si ma famille n’est pas en parfaite harmonie avec ma femme, je ne peux qu’arranger la situation à travers le dialogue. Aussi, je ferais connaitre à chacun sa place», dit M. N, un autre père de famille.

  1. S, chauffeur de bus partage aussi la même vision. Selon ce dernier, « il y a des belles familles qui sont très difficiles à satisfaire. Personne ne peut vivre avec elles, tellement elles sont compliquées. Il y a des belles mères qui ne tolèrent rien à leurs belles filles alors qu’elles devraient les considérer comme leurs propres enfants pour faire régner la paix et la bonne ambiance dans les foyers.

Mais aussi pour aider leur fils à être dans la tranquillité et loin du stress». Et d’ajouter : «Nous avons une position difficile parce que quand notre femme et notre mère ont un problème, on est très mal à l’aise. Pour la simple raison que qu’on ne peut prendre une décision pour éviter d’être accusé de prendre parti»

Le conducteur suggère cependant aux hommes, dans ce genre de situation, de s’armer toujours de patience et de retenu pour éviter de dire ou de faire quelque chose qu’ils pourront regretter.

Le chauffeur, en personne expérimentée, ne nie pas le fait qu’il y ait des hommes faibles de caractère qui se laissent manipuler facilement par leurs femmes ou leur mère. Il ajoute même que quelque fois ce sont les hommes qui créent aussi les problèmes car, voulant mettre leurs épouses au-dessus de tout le monde. «Et ça peut créer des divergences dans une famille».

Quand l’argent ne fait pas le bonheur

Par ailleurs, le logique économique impacte la santé du couple. Ainsi, on voit des parents qui poussent souvent leurs filles à se marier avec un homme riche ou dont la situation financière est à même de prendre en charge les besoins de la conjointe.

Le luxe prenant le pas donc sur l’amour, le ménage vacille et débouche souvent sur le divorce.

Cette femme, la trentaine, confesse Z. S: « mon premier mariage remonte d’il y a dix ans, c’est-à-dire lorsque j’avais 20 ans. J’ai vécu le pire de ma vie avec un homme qui avait plus de 65 ans et pourrait être mon père et cela à cause de ma mère qui est une matérialiste, une mondaine.

Une année de sacrifice que j’ai eu à supporter pour les caprices de ma mère. C’est vrai que j’avais tout le luxe que la vie pourrait m’offrir, mais le bonheur du mariage et l’amour me manquait et j’ai fini par divorcer au bout d’un an.

L’âge tardif auquel les filles se marient de nos jours mis en cause par certains

Pour M. W, la soixantaine passée : « Le mariage est conçu comme l’union par laquelle un homme et une femme consentent à fonder un foyer dans une certaine époque, le mariage se faisait très tôt.

Ainsi, Avant l’âge de 20 ans déjà, les filles étaient épouses et les hommes ne dépassaient pas 22 ans. Ce qui faisait que les deux partenaires étaient tout à fait innocents. Ils n’avaient aucune expérience, ni une notion des loisirs de la vie.

Ils se suffisaient de ce que leur recommandaient leurs parents et n’avaient donc pas le temps de faire autre chose. Quand une jeune fille était donnée en mariage à un jeune âge, elle rejoignait d’abord sa tante paternelle qui la gardait avec elle pendant un moment pour renforcer l’éducation déjà reçue chez ses parents. Mais aussi, l’apprentissage des bons comportements qu’une jeune fille doit adopter envers son mari et sa belle-famille».

Lorsque l’un des partenaires commettait une erreur, ni les parents du jeune homme, ni ceux de la jeune fille n’étaient au courant. Les deux conjoints parvenaient à régler leur problème à l’amiable sans que personne ne soit mis au parfum de la situation. Malheureusement, cette époque où les «sages» intervenaient dans les ménages est dépassée.

Ce qui est totalement différent aujourd’hui. Ce qu’on voit actuellement, c’est que les gens se marient tardivement après avoir vécu beaucoup de choses.

Ils ont le temps de s’habituer amplement à des vies qui engendrent des comportements négatifs comme le matérialisme, l’oisiveté, le mauvais compagnonnage, la liberté etc. Le divorce est donc devenu une solution pour le couple qui ne se donne plus la peine de régler le moindre différend. »

L’indiscrétion, soutenue par d’autres comme cause du divorce

L’autre problème aujourd’hui, dans la plupart des ménages, c’est qu’il n’y a plus de discrétion. Souvent, on remarque que dans un couple, dès qu’il y a une dispute, l’un des partenaires dévoile tous les secrets de l’union ailleurs. Les jeunes filles présentement confient leurs difficultés à leurs amies qui donnent rarement de bons conseils, de même que les hommes.

Une dame qui préfère garder l’anonymat est convaincu que « l’indiscrétion peut dans certains cas, gâcher un mariage. Dès fois, par malchance, on s’engage avec quelqu’un qui n’a pas sa langue dans la poche. Une personne qui parle partout et dit n’importe quoi, à n’importe qui, cela peut amener des problèmes au sein du couple».

Et de poursuivre : « Il y a des gens qui n’ont aucun savoir vivre et qui n’hésitent pas à vilipender leur conjoint ou conjointe. Ce qui peut en retour le vexer et l’agacer une fois que la rumeur éclate».

Une autre commerçante de 45 ans souligne que : « L’indiscrétion doit faire partie des choses à éviter dans un mariage, car même si elle ne conduit pas au divorce, elle peut créer des incompréhensions ».

Selon un autre père de famille interrogé, la cause immédiate qui peut mettre fin à une union serait plutôt le manque de confiance. Il soutient que l’absence de confiance est un réel motif qui peut mettre fin à une relation. Une relation ne peut être sauvée si elle n’est pas basée sur la confiance mutuelle. Les deux partenaires doivent à chaque fois se sentir protégés, souligne-t-il toujours

On voit donc que les causes de divorce dans la société sénégalaise peuvent être incommensurables et le phénomène prend plus de l’ampleur de jour en jour.

Ne serait-il pas temps alors de faire une analyse plus profonde et plus poussée afin d’essayer de voir une cause réelle qui peut regrouper ou englober toutes ces choses citées ?

Ne pensons- nous pas que le principal problème est lié d’abord au bon choix de la femme ou de l’homme avec qui on veut se marier en se basant sur les bon critères de sélection recommandés par l’islam et aussi au respect stricte des recommandations divines du mari envers sa femme et vice versa ?

Sokhna Rama Guissé Diagne

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