Religions et spiritualité

SEYDI HÂJI MALICK SY : DIMENSION MYSTIQUE ET ŒUVRES (PARTIE 1)

Dans l’histoire de l’Islam et de la Tijâniya, on se rappellera toujours de Seydi Hâji Malick Sy. Durant son passage terrestre, ce Qutbul Aqtâb a toujours caché sa grandeur spirituelle céleste, pour porter le chapeau du pieu savant réformateur qui démolissait l’idéologie colonialiste pacifiquement : il a su cohabiter avec le blanc, mais n’a jamais été son valet. De par sa sagesse et son wilaya, Seydi Hâji Malick avait mystiquement dominé son temps, et trompé positivement deux : le colon français et les sénégalais. En premier, les rapports coloniaux de l’époque le jugeaient comme un pacifique maitre soufi qui ne faisait qu’enseigner et éduquer ses disciples. Mais comme l’a rapporté Mawlâya Seydi Mouhamed EL Cheikh, l’un de leur supérieur resté au bercail leur répondra tardivement : « qu’il a gagné contre vous, c’est lui-même que vous devriez attaquer en premier ». Hélas, il avait déjà implanté des généraux islamiques, dans tous les coins du Sénégal.

 Du côté des populations, Seydi Hâji Malick est toujours resté dans les cœurs comme étant le guide exemplaire. Médiateur hors pair, on raconte souvent comment il avait sauvé les habitants de Guet Ndar, lorsque le colon s’apprêtait à les fusiller. En matière de science islamique, il était le maitre incontesté. Il a publié un nombre colossal d’œuvres dans divers domaines et formé quasiment tous les grands érudits dont le Sénégal se rappelle : il est rare de trouver quelqu’un qui n’a pas étudié directement ou non dans l’université de Maodo. En tant qu’un des grands khalifes de la Tarîqa Tijâniya, il a su répandre la Tarîqa dans les coins les plus reculés du Sénégal, idem pour la religion islamique.

Il préférait voiler sa véritable dimension pour servir d’exemple aux dirigeants de l’Islam. Mais avant tout, comme le khalife de Médina Cheikh nous le fit comprendre : « c’est parce que sa mission était du chahâda ». Précisément, il était venu pour enseigner l’Islam et la Tarîqa Tijâniya dans le cadre fondamental. S’il s’agissait uniquement de chercher de la renommée, de montrer des miracles ou des grades célestes, on ne parlerait aujourd’hui d’aucun autre au Sénégal car en tant que Qutbul Aqtâb il avait le pouvoir spirituel capable de dominer le monde sous tous les fronts.  « De tous les prodiges, je préfère l’istiqâmah (la droiture) » est l’une de ses célèbres assertions.

SES GRADES SPIRITUELS ET DIMENSIONS MYSTIQUES

Seydi Hâji Malick Sy est un Qutbul Aqtâb. , Il est important de rappeler que la dimension spirituelle d’un Qutbul Aqtâb n’est pas comparable au grade de Qutb zamane car beaucoup font la confusion. De toutes les générations d’awliyas, les Qutbul Aqtâb sont au nombre de (4) et pas plus. Ils sont les plus gradés de l’assemblée céleste de la Hadaratul Ilahiya et n’ont qu’un seul maître : Le khatmiya du Prophète Mouhamad (s.a.w) qui est Mawlâya Cheikh Ahmad Tidjâni. Les Aqtâbs sont des élus à part : ils n’ont pas d’égal dans l’univers divin. Et après Mawlâya Cheikh Ahmad Tidjâni, ils sont les plus proches du Prophète Mouhamed (s.a.w) sur le plan de la lumière, constituant même son entourage et famille spirituelle directe. Comme tout grand waliou d’Allah, Seydi Hâji Malick a d’abord vécu en tant que lumière (Nourâniyu), passa ensuite à une existence spirituelle (Roûhâniyu) dans les univers célestes, avant de venir sur Terre sous la forme humaine (Insâniyu).

Ainsi retraçant les dimensions mystiques de Seydi Hâji Malick, Mawlâya Seydi Mouhamed EL Cheikh a révélé une panoplie de secrets mystiques sur sa vie.

En premier, tout élu d’Allah a été façonné via un des (4) océans de lumière de Ghaïb (Bahrul Miftâh, Bahrul Kunûz, Bahrul Qâçiya et Bahrul Kanzam). Chacun de ces océans est sous l’emprise d’un Qutbul Aqtâb. En ce qui concerne Seydi Hâji Malick Sy, il détient l’exclusivité du Bahrul Kunûz : il est ainsi le dirigeant de tous les walious de la catégorie kunûz.

Depuis le monde Al Ghaïchiya, jusqu’au monde Ghaïb, il a vécu et gagné beaucoup de trophées de lumière. Au monde Ghaïb, Seydi Hâji Malick a vécu durant 400 ans dans la lumière du Prophète Seydi Ahmed (s.a.w). Lors de la naissance du Prophète à la Mecque, il l’a mystiquement accompagné durant toute sa vie ; les précisions apportées dans son Khilâss Zahâb sont des preuves nettes de cette cohabitation. Seydi Hâji Malick SY a une relation privilégiée avec le Prophète (s.a.w) et avec son maître Mawlâya Cheikh Ahmad Tidjâni.

Au monde Ghaïb, il a vécu pendant 66 ans dans la lumière de Mawlâya Cheikh Ahmad Tidiane Chérif. Sa capacité de zikr est inégalable quand on sait qu’il a devancé des anges dans une compétition de zikr de la Salatoul Fâtiha durant 70 jours. Et ces derniers avaient chacun 10.000 mains et chaque main possédait plus de 10.000 doigts, et chaque doigt, un chapelet de 10.000 perles avec lesquels ils effectuaient le zikr. Il a vécu 1000 ans au monde Al Ghaïchiya en tant qu’enseignant de la science de lumière des noms divins. Maodo (Rta) a eu un grade dans le zikr de la salatoul Fatiha à tel point que Mawlâya Cheikh Ahmad Tijāni Chérif lui donna l’autorisation de créer sa propre Tarîqa au sein même de la Tijâniya, mais il déclina l’offre deux fois de suite.

Après sa mort, Mawlaya Cheikh Ahmad Tidjâni lui donna une mission d’administrateur dans son paradis de l’au-delà (Barzakhul Maktûm) : c’est lui qui y dirige les séances de Wazifa.

Allah (swt) lui a donné un grand privilège de sorte qu’à chaque nuit de « Leylatoul Qadr », le Coran prend sa forme spirituelle et vient jusque dans son mausolée pour y réciter les versets des 114 sourates, puis procéder à leur interprétation en guise de récompense pour le saint homme. Il avait en effet sacrifié sa vie dans la maitrise et la pratique du livre saint.

De son vivant, lorsqu’il traversait « Bassâtoul Jalâl » pour aller visiter le 7ème ciel, Maodo faisait partie des rares Qoutb pour qui Dieu (swt) ordonnait aux anges (qui tiennent le Trône) de s’incliner jusqu’à ce que Maodo Malick termine son audience avec LUI.

Les faits marquants de ses dimensions mystiques sont loin d’être exhaustifs, d’ailleurs même un livre entier y a été consacré.

SES RÉALISATIONS DANS L’ISLAM AU SÉNÉGAL EN PLEINE PÉRIODE DE COLONISATION

Grand philosophe et intellectuel Seydi Hadji Malick Sy alias Maodo (r.t.a) fut un vaillant élu de Dieu dans sa vie en tant que lumière (nouraniyou). À son passage sur terre (chahada) sa dimension d’érudit ne faisait aucun débat.

Beaucoup de gens ignorent l’inusable philosophe et intellectuel qu’il fut. Force est de constater la marque indélébile que Maodo tamponna de son empreinte dans la Tijania et dans l’islam.

Son assertion sur l’istiqama ou la droiture précitée en introduction souligne l’assurance d’un homme doté à la fois d’une grande maîtrise spirituelle et des aléas mondains. Parmi les aléas auxquels Maodo allait faire face, se trouve la colonisation. Il l’affronta sans détour, la force tranquille. Preuve de la détermination et de la sagesse qui l’ont accompagnées toute sa vie durant.

À l’époque coloniale, l’appel à la prière ne pouvait guère être proclamé comme bon semblaient les muezzins, coincés sous l’emprise du diktat des colons. Seul un homme fit exception, Seydil Hadj Malick Sy rta, accompagné de ses fidèles.

Le subtil et fin personnage qu’il était, alla jusqu’à faire dire aux colons dans leurs rapports : au Sénégal il y a un seul guide religieux : El Hadji Malick Sy rta. Ces derniers étaient pourtant armés et réputés hostiles à la cause de l’islam.

Maodo exécuta néanmoins parfaitement son plan d’action sans pertes et fracas comme suit.

– Construction d’une zawiya à St louis, au cœur du système colonial ;

– Construction d’une zawiya à Dakar, autre base dudit système. Encore de nos jours on peut y apercevoir le défilé incessant des véhicules de fonction du gouvernement, symbole du pouvoir politique qui fut jadis celui des colons.

– Construction d’une zawiya à Tivaouane autre base importante des colons.

Dans ces Zawiya, l’appel à la prière y était non seulement proclamé mais aussi les séances de wazifa, matin et soir en sus de la Hadaratul jumah. De surcroît les litanies en assemblée se faisaient à l’aide de hauts parleurs. C’est dire la détermination du saint homme qui ne ménagea aucun effort et mena à bien sa mission haut et fort jusqu’à l’aune de sa disparition en 1922.

Une vie passée en pleine occupation coloniale qui ne l’empêcha pas tel un fin stratège d’implanter pas moins de 427 mosquées recensées.

Côté Philosophique, Maodo a été instigateur et maître dans l’art de la décentralisation que les colonisateurs ont copieusement plagiée.

Il a formé et plaça ses représentants à tous les coins du pays jusqu’au niveau de la sous-région. Nous pouvons citer : Serigne Alioune Gueye de Tivaouane, Seydil Hadji Rawane à Mpal, Elimane Sakho de Rufisque, Thierno Alioune Kandji de Diourbel, Tafsir Abdou Cissé de Pire, Seydi hadi touré à Fass Touré, Gorgui Alioune Ba de NGoumba, Bira Gueye de Nayobé, Ndary Mbaye au Gabon, El Hadj Amadou Bouyo Guèye en Côte d’Ivoire, Madiakhou Diongue au Congo Belge, actuel RDC etc. etc.

Dans chacun de ces terroirs, ses représentants reproduisaient à leur tour le même modèle de pratique islamique de leur maître. Si 427 mosquées ont été inaugurées grâce à son système politique lors d’un recensement, c’est sans tenir compte de celles situées dans les villages reculés parfois sinueux, voire méconnus du grand public.

Le Gamou tel que nous le connaissons aujourd’hui a en premier lieu été rendu célèbre par Maodo en 1902. Toute l’organisation contemporaine y attenante est un héritage tiré de cette époque dans un contexte menaçant.

Maodo a développé une large étendue d’instituts, lesquels alphabétisaient la population en sciences islamiques basées sur la Tidjânia. C’est ainsi qu’en la matière, la plupart des œuvres littéraires d’aujourd’hui imbibent de leur plume une encre qui provient des établissements de la pensée de Maodo, parfois à leur insu par méconnaissance de l’histoire de Seydil Hadji Malick Sy rta, qutbul aqtâb.

SES ŒUVRES SUR LA TARIQA TIDJÂNIA

La clé : comment un homme à priori démuni d’armes telles qu’en possédaient les colons, a-t-il pu drainer autant de disciples dans le contexte colonial ? Comment a-t-il réussi à déployer l’islam à travers tout le territoire, là où ces derniers avaient la mainmise ?

Seydi Mouhamed EL Cheikh nous insuffla une piste de réponse. Et cette dernière se trouve dans la clé mystique secrète que Maodo inclut dans la litanie de la wazifa qu’il enseigna comme suit :

« Minane nassara wamane khafaw tariqahoumou yallahou ya hayou ya mane qala adh’ouni »

Une clé courte mais remplie de bénédictions contre les méfaits des détracteurs de la Tidjania.

Minane nassara :

A ces mots, les âmes de tous les détracteurs (colons et leurs suppôts) furent saisies, prêtes à exécuter la moindre injonction du saint homme Maodo.

Du Sénégal à la France, du gouverneur local à l’ensemble du maillon allant jusqu’aux plus hauts dirigeants du système établi, tous étaient mystiquement captés par la résonnance spirituelle de l’interpellation.

Wamane khafaw tariqahoumou :

Que la Tariqa Tidjânia ne souffre d’aucune nuisance et d’aucun mal d’où qu’ils proviennent. Que les colons et consorts susceptibles de mijoter des plans, des ruses et toutes sortes de méfaits à l’encontre de la Tariqa de Cheikh Ahmed Tidjani ici au Sénégal, soient systématiquement rendus caducs.

En conséquence, ce vœu exaucé permit à Maodo de dérouler sans encombre sa noble mission malgré la menace.

yallahou ya hayou ya mane qala adh’ouni :

Seydil Hadji Malick Sy rta fait ici 3 interpellations de noms divins :

Par ya Allahou : il appela Dieu qui lui répondit, prêt à l’exaucer.

Par ya hayyou : il l’interpela à nouveau, le désignant comme Celui qui vit et ne meurt jamais.

Enfin par ya mane qala adh’ouni :

Maodo vient notamment sous-tendre la parole de Dieu suivante :

« Ad’ouni astajib lakoum » (Sourate 40 V.60), voulant dire « Priez Moi et Je vous exauce » ou encore « demandez Moi et Je vous donne »

Pourquoi Maodo ne s’est-il pas limité à l’invocation d’un seul nom divin à ce moment précis, mais s’y repris à 3 reprises ?

C’est par cette 3ème formulation que la demande de Maodo atteignit son paroxysme. La fameuse clé venait d’être insérée dans cette invocation qui scella définitivement la garantie et la sauvegarde de la tarikha Tidjânia que rien ne pouvait altérer.

Les œuvres littéraires de Seydi Hâji Malick Sy nous intéresserons dans la deuxième partie consacrée à cet éminent élu de Dieu.

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