Religions et spiritualité

Heul min sabiline ou l’amour inconditionnel d’un disciple pour son maître

Dans une formation  spirituelle comme elle est pratiquée dans la voie soufie de la tijaniya,  l’amour que voue le disciple à son maître est d’une importance capitale. Partant de ce fait, il n’est donc pas surprenant que quelqu’un comme Cheikhal Khalifa Ababacar Sy décline sa passion obsessionnelle pour son guide Mawlaya Cheikh Ahmad Tijane Chérif (rta).

Dans son célèbre poème intitulé « heul min  sabiline » ou « existe-t-il une issue à l’amour que je lui porte ? »,  Cheikhal Khalifa, de par son style d’écriture,  éveille chez le lecteur une certaine tristesse dès les premiers vers.  Cette affliction qui envahit le lecteur est due au fait que ce dernier se retrouve  désemparé face à la mélancolie de l’auteur et le questionnement que se pose ce dernier à savoir s’il trouvera une issue à sa détresse amoureuse. Souvent, les poètes arabes attribuent les noms de Salma, Leyla ou Maya à leur idylle, tradition qu’a voulu perpétuer Khalifa Ababacar Sy dans ce chef d’œuvre.

Dans les vers 5 et 6, l’auteur nous décrit les sacrifices, ô combien difficiles qu’il faut à un épris comme lui pour toucher du doigt son sujet d’adoration : « L’amour est chemin parsemé d’embuches où alternent joies et douleurs ;

Mais dans ce champ d’épreuves, les fous de l’amour rivalisent d’ardeur vers cette destination. Ils bravent les dangers de l’océan, en plongée ou en traversée. Et ne craignent point de s’enfoncer dans la savane (malgré les risques liés aux prédateurs, les pièges et traquenards de toutes sortes), pour rejoindre l’objet de leur amour, Ô miracle de Dieu qu’est l’amour ! Qui maintes fois poussent les individus à choisir l’aventure à la place du confort et du luxe ».

L’aspirant à l’amour est souvent incompris de son entourage et sa quête qui peut paraître déraisonnée pour certains, les poussent souvent à vouloir le protéger.  L’auteur se prémunit déjà au vers 7 de leurs conseils simplistes face à un sujet éminemment sérieux : « Epargne ton effort, toi le Censeur qui cherche à me raisonner car mon cas est au-dessus de ta compréhension. Demeure avec tes enfantillages et ta vision superficielle des choses ».  

Quand Khalifa Ababacar Sy nous dit dans le vers 9 : «  Nos rencontres secrètes nous ont convaincu de notre amour mutuel ; Moi, je suis l’esclave qui a souffert à cause de l’amour depuis l’aube des temps, donc ne te fatigue pas à vouloir me faire entendre raison »,  cela nous renvoie directement aux enseignements inédits de Mawlaya Seydi Mouhamed El Cheikh sur l’auteur lui-même. Cet amour qui le fait souffrir « depuis l’aube des temps » renvoie à ses existences antérieures au monde chahada. En effet, Khalifa Ababacar Sy est né dans le monde Al Khayshia en état de lumière et y a vécu  pendant trois cents soixante-dix-sept ans dans la lumière du prophète Seydi Ahmad (saw),  pratiquant le zikr de la Salatul Fatiha. Il y a vécu ensuite, en tant qu’âme, dans la lumière de Mawlaya Cheikh Tijane Chérif pendant deux cents quarante-quatre ans, avec la Diawharatoul Kamal comme invocation ; ce qui  explique encore une fois  la vision superficielle que pourrait avoir quelqu’un  pour qui cette passion débordante qu’éprouve l’auteur,  ne daterait que  de l’époque terrestre. La pratique du zikr dans la tarikha tijane ouvre à des réalités inaccessibles aux  seuls adeptes de la chariatou mouhammadiya  mais crée cependant une  connexion entre les mondes batine et chahada ; ce qui facilite l’interaction entre les différents êtres évoluant dans ces deux mondes, chose qui parait invraisemblable dans l’esprit de certains théologiens musulmans. Il n’est donc pas fantasmagorique, dans l’esprit du disciple tijane s’adonnant aux zikrs, d’assimiler facilement l’information selon laquelle Khalifa Ababacar Sy a l’habitude de rencontrer secrètement le sujet de son obsession dans le monde chahada et qu’aux travers de leurs trouvailles, lui, Cheikhal Khalifa, a eu la certitude de leur amour qu’ils se vouent mutuellement.

Tout au long des vers qui suivront (vers 19 à 21), le lecteur se rend compte que la vision qu’il pourrait avoir de  l’amour est différente de celle de Cheikhal Khalifa.  L’amour  que l’on considère universel dans la conscience collective du monde chahada et qui  a tendance à s’effriter,  est différent de la conceptualisation qu’en font les saints du damiroul kawni (conscience universelle) comme Seydi Ababacar Sy, d’où son injonction faite  au lecteur au vers 22,  de revenir à un amour fidèle mais surtout, de nourrir une passion pour celui qui, seul,  mériterait d’en être l’objet : « Reviens vers celui qui est fidèle en amitié, signe l’allégeance perpétuelle avec cette compagnie agréable qui, du fait de sa délicatesse exquise, agit envers toi avec grâce et bonté ». Le voile se lève enfin sur « le fidèle » en amitié à partir du vers » 23 à la fin. La passion débordante dont il est l’objet dans ce poème est voué à Cheikh Ahmad Tijane Chérif (rta), l’ultime secours dont la réalité salvatrice est due à son grade de khatmiya, «Lui, l’ultime étape ou le terminus vers qui déferlent les hommes, qui affluent de toutes les contées et de toutes les régions en quête de Dieu, de salut et de nourriture céleste. Le tabernacle de la sainteté, le phare de la guidance pour sortir des ténèbres, le sceau des saints jusqu’à la fin des temps  (vers 23 et 24) ».

Dans ses multiples enseignements d’une dimension sans commune mesure, Khoutboul Akhtaboul Kabir Mawlaya Seydi Mouhamed El Cheikh nous livre une réalité jusque-là inconnue du prophète seydi Ahmed (saw). En effet, Mouhammad Ibn Abdallah qui a foulé le sol de la Mecque et y a fondé une famille, reflète une autre nature héritée de la lumière divine depuis le monde Al Bast. C’est dans ce sens qu’El Hadj Malick Sy nous dit que lorsqu’Allah (swt) a voulu créer l’être humain,  «  Il a tiré de Sa lumière celle du Prophète ». Seydi Ahmad est donc tiré de la lumière divine, sauf que Mawlaya Cheikh Ahmad Tijane, lui à son tour, provient de la lumière prophétique, et cela aussi, depuis Al Bast. Seydi Ahmad donc ou Mouhammadoul Bast, a donc engendré de par sa lumière, Mawlaya Cheikh Tijane, ascendance lumineuse qui lui confère le statut  de descendant réel du prophète, lui, le Pôle Caché qui a toujours existé dans la lumière de Seydi Ahmad quand ce dernier était encore dans la lumière divine ; d’où les termes utilisés à la fin du vers 25 par Cheikhal Khalifa pour désigner Mawlaya Cheikh Tijane : « descendant de la Taha-Yassine ». Dans le Coran, il existe une sourate, la vingtième dans le livre sacré, intitulée « TA-HA ». Il a fallu l’arrivée de Mawlaya Seydi Mouhamed El Cheikh pour que l’on comprenne que TAHA est le nom de Mawlaya Cheikh Tijane et non le titre de la sourate tiré des deux premiers mots qu’elle renferme. « Yassine » est en réalité un nom du prophète Seydi Ahmad (saw) et pas seulement le titre de la sourate 36. Mawlaya Cheikh donc, « le secret des secrets » (vers 26) parce- qu’il détient le secret de la création du prophète,  « le fils prodigue »  parce-qu’ issu du prophète, « le Cheikh des Cheikh dans l’islam et la tradition » (vers 27) pour ce qui est du fait qu’il est le saint des saints et le katmiya (intermédiaire entre le prophète Seydi Ahmad (saw) et les autres prophètes). La tradition dont il est question ici est liée au rôle qu’a eu à jouer Mawlaya Cheikh Tijane dans la mission de tous les prophètes qui ont précédé Seydi Ahmad (saw) et qui traditionnellement sont tous venus sur terre pour la même mission : proclamer et enseigner l’unicité d’Allah (swt).

A partir du vers 31, il est question de la tarikha tijane et de ses  immenses bienfaits  car c’est «  la voie de la vérité » (vers 32). Cela est dû au fait que c’est la voie d’Allah (swt) et de son prophète ; s’affilier à la tarikha tijane reviendrait à adhérer à la même voie spirituelle qu’Allah (swt) et Seydi Ahmad (saw) ; pour le sceptique, il lui suffirait pour preuve d’observer « le mode d’existence de ses adeptes dans l’échelle des valeurs » (vers 34). Les oraisons de la tarikha tijane (laazim, wazifa et hadaratul jumma) agissent directement sur l’âme du disciple. Le laazim relève de l’éducation spirituelle, la wazifa qui est la base opérationnelle de la tarikha donne au disciple encore vivant la chance d’assister à une assemblée présidée par le prophète et quant à la hadaratul jumma, elle permet à l’adepte de rattraper son déficit de lumière et de gommer chaque semaine, toutes les aspérités qui peuvent être un frein à son élévation spirituelle.

Au vers  45,  Cheikhal Khalifa Ababacar Sy décline d’une façon très codée une réalité de la tarikha tijane qu’il connait bien. En effet, Mawlaya Cheikh Ahmad Tijane Chérif choisit lui-même ses disciples : « Nombreux sont ceux qui aspirent à être comptés aux nombres des adeptes de Cheikh ». Les âmes des adeptes choisies par Mawlaya Cheikh sont confiées à Khalifa Ababacar Sy lui-même qui est chargé de les éduquer à travers le zikr de la Salatul Fatiha dans un des sièges de la tarikha tijane, Bakhrou Khalsoum ou l’actuelle mer rouge. C’est donc là une information non détaillée qu’il donne parce-qu’il se trouve au cœur de cette sélection des disciples et le rôle qu’il joue à ce niveau est non négligeable.

Chaque vers de ce poème peut faire l’objet d’une étude approfondie. Il nous faudra plus qu’un article pour mettre en exergue certaines réalités que Cheikhal Khalifa Ababacar Sy a scellé à travers les lignes, les expressions, parce-que sa mission n’était pas de dévoiler certains secrets de la tarikha tijane. Avec l’arrivée de Mawlaya Seydi Mouhamed El Cheikh et ses enseignements révolutionnaires,  aussi bien sur les secrets de la voie que les saints qui y ont œuvré, il serait peut-être opportun de jeter un œil nouveau sur les illustres ouvrages que renferme la tarikha tijane.

DESK TARIKHA TIJANE

 

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